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Ne cherchez plus la biographie de Thomas Kilmann…. cette personne n’existe pas !

Deux personnes pour le prix d’un : Ken Thomas et Ralph Kilmann

Quand on parle de la célèbre méthode TKI (Thomas-Kilmann Conflict Mode Instrument) et des 5 styles de gestion des conflits, on cite souvent « Thomas-Kilmann » comme s’il s’agissait d’une seule personne. En réalité, derrière ce nom se cachent deux personnalités distinctes et complémentaires : Kenneth W. Thomas et Ralph H. Kilmann. Cette collaboration fructueuse, née au début des années 1970, a révolutionné notre compréhension de la gestion des conflits en entreprise.

Leur rencontre fortuite à l’université UCLA a donné naissance à l’un des instruments d’évaluation les plus utilisés au monde, vendu à plus de six millions d’exemplaires et traduit dans de nombreuses langues. Mais qui sont vraiment ces deux hommes qui ont marqué le monde du management ? Plongeons dans leurs parcours respectifs et découvrons comment leur collaboration a façonné une méthode devenue incontournable.

Kenneth W. Thomas et Ralph H. Kilmann, les créateurs de la méthode TKI et souvent appelés Thomas Kilmann comme une seule personne

Kenneth W. Thomas et Ralph H. Kilmann, les créateurs de la méthode TKI et souvent appelés Thomas Kilmann comme une seule personne

Kenneth W. Thomas : Le psychologue spécialiste des conflits

Les débuts académiques

Kenneth W. Thomas, docteur en psychologie, a obtenu son Ph.D. à l’université Purdue en 1971, avec une thèse portant sur les modes de gestion des conflits et les conflits interdépartementaux. Dès ses débuts, il s’intéresse aux dynamiques conflictuelles en entreprise et aux moyens de les résoudre efficacement.

Son parcours académique l’a mené dans plusieurs prestigieuses institutions américaines. Il a été professeur de management à UCLA, Temple University, l’Université de Pittsburgh, et enfin à la Naval Postgraduate School de Monterey, en Californie. Cette diversité d’expériences lui a permis d’affiner sa compréhension des comportements organisationnels.

Une carrière dédiée à la recherche appliquée

Ce qui caractérise Ken Thomas, c’est son approche pragmatique de la recherche. Très préoccupé par l’utilité pratique de ses travaux, il s’attache à résumer les enjeux complexes en modèles simples mais efficaces, faciles à retenir et à appliquer. Cette philosophie se retrouve parfaitement dans la méthode TKI, qui transforme des concepts psychologiques complexes en outil accessible à tous.

Ken Thomas a développé non seulement le TKI avec Ralph Kilmann, mais aussi d’autres instruments d’évaluation comme le Work Engagement Profile (avec Walter Tymon) pour mesurer la motivation intrinsèque au travail. Il est l’auteur du livre « Intrinsic Motivation at Work: What Really Drives Employee Engagement ».

Une réputation internationale

Ken Thomas jouit d’une réputation internationale en tant que chercheur, auteur et développeur de matériel de formation. Le TKI qu’il a co-créé s’est vendu à plus de six millions d’exemplaires et est disponible dans de nombreuses langues, y compris deux versions chinoises.

Après avoir pris sa retraite anticipée du monde académique en 2004, Ken Thomas vit aujourd’hui avec sa femme et collègue, Dr. Gail Fann Thomas, à Monterey, en Californie, où il continue son travail appliqué.

Ralph H. Kilmann : L’expert en transformation organisationnelle

Un parcours académique impressionnant

Ralph H. Kilmann a obtenu un B.S. en gestion des arts graphiques et un M.S. en administration industrielle de l’université Carnegie Mellon en 1970, puis un Ph.D. en sciences comportementales appliquées au management à l’université de Californie à Los Angeles (UCLA) en 1972.

C’est précisément à UCLA, en 1970, que sa destinée va croiser celle de Ken Thomas. Ralph était alors un jeune étudiant en doctorat, tandis que Ken était assistant professeur et terminait également son doctorat à Purdue. Ils se sont rencontrés lors d’un séminaire de 24 crédits intitulé « Fondements des Sciences Comportementales », enseigné par cinq professeurs.

Trente ans à l’Université de Pittsburgh

Après UCLA, Ralph Kilmann a immédiatement commencé sa carrière professorale à la Katz School of Business de l’Université de Pittsburgh, qui fut son foyer professionnel pendant trente ans. En 1991, il a reçu la prestigieuse chaire George H. Love Professor of Organization and Management, qu’il a occupée jusqu’en 2002.

Un consultant international reconnu

Ralph Kilmann est reconnu internationalement comme une autorité en matière de changement systémique. Il a conseillé de nombreuses entreprises à travers les États-Unis et l’Europe, notamment AT&T, IBM, Ford, General Electric, Lockheed, Olivetti, Philips, TRW, Wolseley et Xerox. Il a également travaillé pour diverses organisations de santé, financières et gouvernementales, y compris le U.S. Bureau of the Census et le Bureau du Président.

Un auteur prolifique

Ralph Kilmann a publié plus de vingt livres et une centaine d’articles sur des sujets tels que la gestion des conflits, la conception organisationnelle, la gestion des problèmes, la gestion du changement et les organisations quantiques. Son livre le plus récent traite de l’expansion de la conscience : « The Courageous Mosaic: Awakening Society, Systems, and Souls » (2013).

La phase entrepreneuriale

En 2002, Ralph a quitté son poste académique pour réaliser son « rêve californien » et créer Kilmann Diagnostics à Newport Coast, en Californie. En tant que PDG et consultant senior, il crée et publie des cours en ligne et des outils d’évaluation sur la gestion des conflits et la gestion du changement.

La naissance d’une collaboration historique

La rencontre fortuite (1970-1971)

L’histoire de l’instrument Thomas-Kilmann commence à l’automne 1970, lorsque Ralph Kilmann intègre le programme doctoral de la Graduate School of Management d’UCLA. Le séminaire « Fondements des Sciences Comportementales » se réunissait neuf heures par semaine, d’octobre 1970 à avril 1971.

Ralph développait un intérêt marqué pour la conception d’évaluations quantitatives du comportement humain, ce qui l’a amené à approfondir ses connaissances sur la validité et la fiabilité des évaluations. Ken, de son côté, travaillait sur sa thèse de doctorat concernant les modes de conflit et les conflits interdépartementaux, tout en rédigeant un chapitre important sur « Conflit et Gestion des Conflits ».

L’inspiration de Blake et Mouton

Kenneth Thomas et Ralph Kilmann ont fondé leur inventaire de styles de conflits sur la grille de gestion développée par Blake et Mouton. Ils ont organisé cinq approches de résolution des conflits selon deux caractéristiques individuelles : l’affirmation de soi et l’esprit de coopération.

Ken réinterprétait le cadre de Blake et Mouton – passant des dimensions indépendantes de « préoccupation pour la production » et « préoccupation pour les personnes » aux dimensions indépendantes d’assertivité et de coopérativité, respectivement. Ils ont ainsi procédé naturellement avec ce modèle révisé pour définir les cinq modes : compétition, collaboration, compromis, évitement et accommodation.

Le défi de la désirabilité sociale

Le plus grand défi dans la conception d’un meilleur instrument pour mesurer le comportement de gestion des conflits était de surmonter le biais de désirabilité sociale : la tendance des gens à présenter l’image la plus socialement acceptable d’eux-mêmes, plutôt que de se présenter tels qu’ils sont vraiment.

Leur solution innovante consistait à créer trente paires d’énoncés. Pour chaque paire, le répondant doit choisir entre l’item A ou B, mais chaque paire était spécifiquement conçue pour être égale en désirabilité sociale. Ils ont ainsi rendu très difficile pour les personnes de choisir des items pour bien paraître ; elles n’ont guère d’autre choix que d’indiquer comment elles se comportent réellement dans les situations de conflit.

Une décision cruciale (1973)

En 1973, Ken et Ralph ont terminé leur article de recherche sur le développement et la validation de leur instrument de conflit. Ils ont fait face à un dilemme : devaient-ils inclure le TKI dans l’annexe de leur article (ce qui limiterait son exposition) ou essayer de le faire publier comme un outil d’évaluation autonome ?

Un professeur de marketing distingué leur avait conseillé : « Ne soyez pas ridicules. Seuls les chercheurs sont susceptibles d’utiliser votre questionnaire de trente items. Mettez-le dans l’annexe de votre article et n’en parlez plus. » Heureusement, ils n’ont pas suivi ce conseil !

La chance a tourné lorsque Dr. Warren Schmidt, directeur du développement exécutif à UCLA, a demandé à Ken de l’aider à développer du matériel de cours pour un programme de formation sur la gestion des conflits, sponsorisé par Xicom, Inc. Lors d’une visite à Xicom, Ken a apporté une copie du TKI et a demandé s’ils pourraient être intéressés à le publier comme outil de formation en management.

Le succès immédiat

En 1974, Xicom a publié le TKI sous forme d’un livret de seize pages. Avec les trente paires d’items et une page d’auto-notation, les répondants pouvaient également graphiquer leurs scores par rapport à un échantillon normatif de 339 cadres moyens et supérieurs du gouvernement et des entreprises.

L’évolution et l’héritage du TKI

Les améliorations continues

À la fin des années 1970, ils ont commencé à recevoir quelques plaintes concernant l’usage exclusif de pronoms masculins dans le TKI. Au milieu des années 1980, les pronoms masculins sur cinq items ont été changés en he/she, his/hers, ou him/her, résolvant ainsi la question du genre.

L’expansion internationale

En 1998, Xicom, Inc. a été acquise par CPP, Inc. (maintenant The Myers-Briggs Company) à Mountain View, Californie. Le livret TKI a été imprimé en couleur et traduit en espagnol, français et portugais. En 2002, CPP a mis le TKI en ligne, permettant des scores générés par ordinateur et des résultats instantanément graphiqués.

Le TKI est maintenant disponible dans plusieurs langues : espagnol, français, portugais, danois, néerlandais, suédois, japonais et chinois (traditionnel et simplifié).

La validation internationale

Des études internationales ont montré que les normes américaines du TKI ne divergent pas fortement de celles des autres pays étudiés. Ainsi, tant Ken et Ralph que CPP ont conclu avec confiance que le profil TKI actuel, utilisant la version anglaise de l’évaluation, peut être utilisé en toute confiance pour interpréter les résultats pour des personnes d’origine et de résidence internationales.

Les nouvelles innovations

Thomas et Kilmann ont récemment créé un rapport d’équipe TKI spécialement conçu qui calcule automatiquement un profil d’équipe TKI composite pour l’utilisation relative d’une équipe des cinq modes de conflit, ainsi qu’un certain nombre de comparaisons individuelles/équipe concernant la surutilisation et la sous-utilisation possibles des cinq modes de conflit.

L’impact durable sur le management

Un succès commercial phénoménal

Le TKI repose sur 40 années de recherche et d’implémentation par les auteurs. Leur modèle s’est imposé comme la principale mesure des modes de gestion des conflits, s’appuyant sur des centaines de recherches et s’est vendu à plus de six millions d’exemplaires.

Une méthode universellement adoptée

Thomas et Kilmann restent des intervenants populaires dans le domaine de la résolution des conflits, et leurs idées et produits sont très sollicités. L’application du TKI a été soutenue par des recherches sur des sujets allant du leadership à l’intelligence émotionnelle.

L’héritage contemporain

Aujourd’hui, les deux créateurs continuent leur travail de manière différente. Ralph Kilmann, à travers Kilmann Diagnostics, se concentre sur l’e-learning en créant des cours en ligne enregistrés sur la gestion des conflits et la gestion du changement. Il suggère d’élargir la conscience esprit/corps/âme pour tous les citoyens et d’intégrer cette conscience élargie dans toutes nos organisations et institutions.

Ken Thomas, de son côté, continue de développer des outils et du matériel de formation, restant fidèle à sa philosophie de création de solutions pratiques et accessibles pour les défis managériaux.

Conclusion : Deux visionnaires, un héritage commun

L’histoire de Kenneth Thomas et Ralph Kilmann illustre parfaitement comment la rencontre de deux esprits brillants et complémentaires peut révolutionner un domaine entier. Leur collaboration, née d’une rencontre fortuite à UCLA il y a plus de 50 ans, a donné naissance à l’un des outils de management les plus utilisés au monde.

Ce qui rend leur travail si durable, c’est leur approche équilibrée : la rigueur académique de leurs recherches combinée à une préoccupation constante pour l’application pratique. Ils ont su transformer des concepts psychologiques complexes en un modèle simple, mémorable et immédiatement applicable dans toutes sortes d’organisations.

Aujourd’hui, quand nous utilisons la méthode TKI et ses 5 styles de gestion des conflits, nous bénéficions de l’héritage de ces deux pionniers qui ont su voir au-delà des approches existantes pour créer quelque chose de vraiment révolutionnaire. Leur histoire nous rappelle que les plus grandes innovations naissent souvent de la collaboration, de la persévérance et du courage de remettre en question les méthodes établies.

 

Cet article vous a plu ? Découvrez notre guide complet des 5 styles de gestion des conflits selon la méthode TKI pour approfondir vos connaissances sur cet outil incontournable du management moderne.

Benoit Lacroix

Benoit Lacroix

Co-fondateur du média Happy Team, Benoît est un passionné de la gestion des ressources humaines et de la résolution des conflits au travail. Il est aussi médiateur.

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